
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le 20 octobre 2022 à Bruxelles (AFP / JOHN THYS)
Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne se sont mis d’accord sur une “feuille de route” de jeudi à vendredi soir, qui vise à mettre en place des mesures pour freiner la hausse des prix de l’énergie dans les semaines à venir.
La guerre en Ukraine et les sanctions imposées à la Russie ont fait grimper les prix du pétrole, du gaz et de l’électricité. Mais depuis février, l’Europe tarde à réagir, fragilisée par les intérêts divergents des Etats membres.
Si le bloc doit agir d’une seule voix après d’âpres négociations, il reste encore de nombreux points à trancher et les négociations des prochaines semaines s’annoncent difficiles.
“Nous avons maintenant un très bon calendrier”, a souligné la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, tandis que le président du Conseil de l’UE, Charles Michel, a évoqué un “accord sur un paquet de mesures” qu’il faut désormais “aborder avec prudence”. .
Mais le chancelier Olaf Scholz a précisé que si les ministres de l’énergie ne parviennent pas à s’entendre sur une version finale, une nouvelle réunion au sommet des chefs d’Etat est nécessaire.
– “Message aux marchés” –
Selon le président français Emmanuel Macron, les mécanismes prévus pourraient être mis en place “fin octobre, début novembre”. Il a estimé que les dirigeants avaient envoyé “un signal très clair de (leur) détermination et (leur) unité” aux marchés.
Selon les conclusions publiées à l’issue de la réunion, les dirigeants ont appelé la Commission à leur présenter des “décisions concrètes” “urgentes” sur une série de mesures, dont des interventions pour freiner la volatilité des prix du gaz.
Les Vingt-Sept se sont mis d’accord pour encourager les achats conjoints de gaz au niveau de l’UE, avec l’idée qu’ils resteront “volontaires” mais couvriront au moins un niveau cible “obligatoire” de 15% des objectifs de remplissage des stocks de l’UE pour l’hiver 2023.
Ils ont également appelé à “accélérer les négociations” avec des pays producteurs “fiables” comme la Norvège et les États-Unis pour “exploiter le poids économique global de l’UE” plutôt que de rivaliser sur le marché mondial avec des risques qui alimentent la fièvre des prix.
Outre une mesure de contrôle du prix de gros des contrats de gaz naturel, les dirigeants réclament également un plan concret de mécanisme “temporaire” de plafonnement du prix du gaz pour la production d’électricité – un dispositif déjà mis en place en Espagne et au Portugal et sera étendu au reste du monde l’UE entière est exigée de la France.
Or, dans une concession à l’Allemagne, ce mécanisme doit s’accompagner de mesures pour « éviter une augmentation de la consommation de gaz ». Elle doit également empêcher l’UE de subventionner l’électricité qui finirait par être exportée vers les pays voisins (Norvège, Royaume-Uni, Suisse, etc.).
– Macron/Scholz, apaisement –
Interrogé sur le couple franco-allemand, moteur apparemment effondré de la coopération européenne, Macron a affirmé que sa rencontre personnelle avec la chancelière allemande avait permis de “clarifier beaucoup de choses”.
Quelques heures plus tôt, il avait senti que Berlin jouait une partition solitaire, blâmant apparemment les Allemands pour les troubles de l’Europe.
“Je pense que ce n’est ni bon pour l’Allemagne ni pour l’Europe qu’elle s’isole (…). Notre travail est de tout faire pour qu’il y ait une unité européenne et que l’Allemagne en fasse partie”, a-t-il déclaré.
“Il est très clair que l’Allemagne a toujours agi de manière très unie”, a déclaré Olaf Scholz.
La chancelière a été accusée d’égoïsme après avoir annoncé fin septembre un plan de soutien de 200 milliards d’euros à l’économie allemande qui n’avait pas été convenu avec ses partenaires.
Sans consulter Berlin, Paris a annoncé jeudi un projet d’infrastructure après des années de blocage : la France, l’Espagne et le Portugal ont annoncé un accord pour remplacer le projet de gazoduc MidCat par un gazoduc sous-marin entre Barcelone et Marseille qui acheminerait du gaz puis passerait au vert en hydrogène.
Lancé en 2003, ce projet MidCat (pour Midi-Catalogne) a été défendu par Lisbonne, Madrid et Berlin, mais s’est heurté à la résistance de Paris. L’objectif était de connecter les réseaux gaziers français et espagnols via un gazoduc de 190 km allant de Hostalric au nord de Barcelone à travers les Pyrénées jusqu’à Barbaira à l’est de Carcassonne.
En pleine nuit, après une dizaine d’heures de négociations entre les 27, Emmanuel Macron et Olaf Scholz ont joué le jeu de l’apaisement, ce dernier évoquant notamment une relation “intense et fructueuse”. Les deux hommes doivent se rencontrer mercredi à Paris.