LA LISTE DU MATIN

Une rafale d’acronymes et d’initiales déborde sur les sorties de la semaine. On commence par RMN, où le Roumain Cristian Mungiu, détenteur d’une Palme d’or (pour 4 mois, 3 semaines, 2 jours 2007) examine un village de Transylvanie. Vient ensuite une onomatopée HE (comprenez “hi-han”), le dernier long métrage du vétéran polonais de 84 ans Jerzy Skolimowski, dont le héros est un petit âne échappé d’un cirque. Enfin, la troncature relâchée de frèresau “Frères”la première incursion de l’écurie Apatow dans le domaine de la comédie gay.
« RMN » : la maison et le monde
En Transylvanie, le pays des vampires et des monstres, si l’on peut le croire Frankenstein Jr. (1974) de Mel Brooks, un village bute contre une montagne. Ici même, dans cette ville multiethnique où vivent des Hongrois, des Roumains et quelques Allemands, Cristian Mungiu a entrepris de scanner l’impact de son pays, la Roumanie.
“RMN” signifie “Rezonanta Magnetica Nucleara”. En français IRM, imagerie par résonance magnétique. Numéro deux d’une boulangerie industrielle, Csilla (Judith State), d’origine hongroise, doit embaucher pour recevoir des subventions de l’Union européenne. Tâche fastidieuse. Il n’y a pas de locaux. L’arrivée de trois Sri Lankais à sa demande déclenchera un violent déferlement de racisme qui mettra à nu le désordre insidieux qui afflige l’humanité du village.
Ce qui fait la force du film, c’est justement l’idée que le village, et avec la métonymie la Roumanie, est vu comme ça au mieux “le plus grand zoo d’Europe”souffre du sentiment d’être laissé pour compte par l’Europe en raison de la présence d’ours et de loups. Au final, Cristian Mungiu ne filme qu’une chose, la peur de l’étranger. Jacques Mandelbaum
“RMN”, film roumain réalisé par Cristian Mungiu. Avec Judith State, Marin Grigore et Macrina Barladeanu (2h05).
“EO”: L’Odyssée de l’Âne
dans le HE, dernier long métrage inattendu et véritable OVNI, du vétéran polonais Jerzy Skolimowski, 84 ans, il faut d’abord entendre des onomatopées. Celle qui s’accroche au cri de l’âne (“ hi-han”), la bête de somme, à laquelle on ne donne généralement pas le premier rôle ici. L’idée n’est pas nouvelle : elle fait référence au chef-d’œuvre de Robert Bresson Balthazar aléatoire (1966) à propos de l’épreuve d’un pauvre âne maltraité par des humains.
EO est le nom de ce petit âne sarde au pelage gris et au regard perdu. On le découvre en animal de cirque, partenaire d’un beau funambule, le seul qui l’aime, le protège et le défende. Foudroyé à droite et à gauche, tiré aux cris et aux glissades, EO entame des difficultés troublantes qui le mènent de haras en élevage, d’un maître à l’autre, et d’une forme d’exploitation à l’autre.
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